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Les délais d'action et de prescription en matière de vente immobilière



Les actions en supplément ou en diminution du prix pour erreur de contenance


On sait que le vendeur est tenu de délivrer la contenance fixée au contrat et que l'article 1617 du code civil prévoit que « si la vente d’immeuble a été faite avec indication de la contenance, à raison de tant la mesure, le vendeur est obligé de délivrer à l’acquéreur, s’il l’exige, la quantité indiquée au contrat. Et si la chose ne lui est pas possible, ou si l’acquéreur ne l’exige pas, le vendeur est obligé de souffrir une diminution proportionnelle du prix ».


L'article 1618 du même code prévoit la situation inverse, au bénéfice du vendeur qui peut obtenir un supplément de prix lorsque la contenance délivrée est supérieure à celle figurant à l’acte dans une mesure supérieure à un vingtième par rapport à la contenance déclarée.


Ces actions fondées sur une erreur de contenance doivent, aux termes de l'article 1622 du code civil, être engagées dans le délai relativement bref d'une année à compter du jour du contrat, à peine de déchéance. Il s'agit donc d'un délai de forclusion susceptible de donner lieu, s'il est écoulé, à une fin de non recevoir qui peut être soulevée en tout état de cause. 


Selon la jurisprudence, l'article 1622 est applicable aux ventes en l’état futur d’achèvement sous réserve que le point de départ du délai d'un an est le transfert de propriété constaté à la livraison, date à laquelle l'acquéreur est en mesure de vérifier la superficie de l'immeuble vendu (notamment Civ, 3ème, 11 janvier 2012 n° 10-22924).


Les actions ouvertes par l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis 


En premier lieu, on sait que ce texte, issu de la loi du 18 décembre 1996 dite loi Carrez, prescrit que toute promesse de vente ou d'achat ou tout acte de vente d'un lot ou d'une fraction de lot d'un immeuble en copropriété (sauf les petits lots accessoires) mentionne la superficie de la partie privative de ce lot.


À défaut, en l'absence de toute mention de superficie, le bénéficiaire de la promesse ou l'acquéreur peut obtenir la nullité de l'acte. Il doit agir dans le délai d'un mois à compter de l'acte authentique constatant la vente.


Si l'acte authentique de vente mentionne la superficie Carrez, sa signature entraîne pour l'acquéreur la déchéance du droit d'engager ou de poursuive la nullité de la promesse qui ne mentionnait pas cette superficie (Civ, 3ème, 22 novembre 2018 n° 17-23366).


En second lieu, le même article 46 de la loi sur la copropriété ouvre à l’acquéreur le droit d’obtenir une diminution du prix proportionnelle si la superficie effective est inférieure de plus d’un vingtième à celle exprimée dans l’acte. Il n'est pas rare que les techniciens mesureurs commettent une erreur, par exemple en incluant une surface relevant des parties communes de l'immeuble (Civ, 3ème, 24 janvier 2012 n° 10-24217).


En cohérence avec le délai de l'article 1622 du code civil, cette action doit être engagée dans le délai d’un an à compter de l’acte authentique constatant la réalisation de la vente.


L'action fondée sur la garantie légale des vices cachés 


On sait que le vendeur est tenu de garantir les défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou diminuent tellement cet usage que la vente n'aurait pu se faire (article 1641 du code civil).


Alors qu'avant 2005, l'action en garantie des vices cachés devait engagée dans un « bref délai », prescription relativement incertaine, l'article 1648 du code civil dispose depuis que l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice. Mais ce n'est là qu'une partie de la règle.


L'article 2232 alinéa 1 du code civil, issu de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription civile, qui est venue sur ce point consacrer une jurisprudence ancienne et constante, énonce que « le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit ».


La date de la « naissance du droit » à l'action en garantie des vices cachés est, selon une jurisprudence constante et ancienne, le jour de la vente et non le jour de la révélation du vice caché.


Ainsi, la règle se définit en deux propositions : l'action en garantie des vices cachés doit être engagée dans les deux ans de la découverte du vice, elle doit aussi être engagée dans les vingt ans du jour de la vente.


Un arrêt récent de la Cour de cassation (Civ, 3ème, 1er octobre 2020 n° 19-16986) a cassé un arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence qui avait déclaré prescrite en application de l'article 2232 alinéa 1 du code civil, l'action d'un acquéreur d'immeuble qui, ayant découvert en 2011 des vices cachés, avait assigné en 2013 les vendeurs successifs de l'immeuble en remontant dans le temps jusqu'en 1990.  La Cour de cassation a retenu que certes la naissance du droit constituant le point de départ du délai de l'article 2232 est le jour de la signature du contrat de vente, mais que cette disposition, issue de la loi du 17 juin 2008, n'est pas applicable aux actions fondées sur des droits nés avant son entrée en vigueur.


L'interruption du délai de prescription, par une action en justice y compris en référé, fait courir un nouveau délai de deux ans. L'expiration du délai pour agir en garantie donne au vendeur, qui doit la prouver, la possibilité d'opposer une fin de non recevoir, qui peut être soulevée en tout état de cause mais ne peut être suppléée par le juge.


L'action en nullité pour défaut de cause


En matière immobilière, cette action vise à sanctionner une condition impossible dans un contrat de vente (par exemple Civ, 3ème, 8 octobre 2008 n°07-14396), ou un défaut de prix sérieux (par exemple, s'agissant d'une cession de parts de SCI, Civ, 3ème, 24 octobre 2012 n°11-21980).


Le délai de prescription de ces actions est de cinq ans, aujourd'hui en application de l'article 2224 du code civil, tel qu'issu de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile.


On sait que, selon une jurisprudence constante, que l'article 1179 du code civil, créé par l'ordonnance du10 février 2016 a consacrée, la nullité d'un contrat pour défaut de cause est une nullité relative en ce qu'elle ne vise que la protection des parties. En conséquence, le point de départ de prescription se situe au jour de l'acte. La Cour de cassation l'a rappelé dans un arrêt récent publié (Civ, 3ème, 24 janvier 2019 n° 17-25793).


Dans cette dernière affaire, un propriétaire avait cédé à titre onéreux un droit de passage dont il est apparu plus tard qu'il constituait une servitude préexistante à la convention. Compte tenu de la date de cette convention, les juges n'ont pu que constater la prescription de l'action. Il eut été plus judicieux d'agir en nullité pour erreur ou dol car, dans ce cas, la prescription court à compter non pas de la date de la convention mais de celle à laquelle le dol ou l'erreur ont été découverts (article 1144 du code civil). 


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