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La preuve de l'état d'enclave


Dans un arrêt du 17 décembre 2020 (n° 19-11376), la Cour de cassation rappelle que le propriétaire qui revendique le bénéfice d'une servitude de passage pour cause d'enclave, doit rapporter devant le juge la preuve de cette situation d'enclave.


Rappelons qu'aux termes de l'article 682 du code civil, le fonds enclavé est celui qui n'a sur la voie publique aucune issue ou qu'une issue insuffisante pour assurer une desserte complète. Le propriétaire de ce fonds est alors fondé à réclamer sur le fonds voisin un passage suffisant, à charge d'une indemnité proportionnée.


Il est admis depuis longtemps que l'état d'enclave peut résulter non seulement de la configuration des parcelles ou d'un obstacle physique, mais aussi d'un obstacle juridique, ainsi qu'une règle d'urbanisme interdisant l'accès d'un fonds à la voie publique (Civ, 3ème, 14 janvier 2016, n°14-26640).


Dans cette affaire, l'auteur de la demande de création d'une servitude légale faisait valoir qu'un panneau de sens interdit, sans restriction au profit des riverains, lui interdisait de rejoindre la voie publique à partir de son fonds. Son adversaire soutenait que cette interdiction exprimée par le panneau de sens interdit ne résultait d'aucune décision administrative.


La cour d'appel de Chambéry a fait droit à la demande, constaté l'existence de l'état d'enclave et instauré un droit de passage sur la parcelle de la SCI défenderesse. Elle a rejeté le moyen soumis en défense, au motif que la SCI ne rapportait pas la preuve, qui lui incombait, de l'absence de décision administrative instaurant cette interdiction.


La Cour de cassation casse cet arrêt au double visa de l'article 682 et de l'article 1353 du code civil. Ce dernier texte énonce que « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ». La cour d'appel, en statuant comme elle l'a fait, a inversé la charge de la preuve de l’état d’enclave invoqué en raison d’un obstacle juridique à l’accès à la voie publique.


La Cour de cassation n'avait pas encore eu l'occasion de rappeler solennellement le principe, au demeurant assez évident, que celui qui réclame le bénéfice d'une servitude légale doit rapporter la preuve de l'état d'enclave. En revanche, elle avait énoncé le principe s'agissant de la preuve d'une servitude conventionnelle (Civ, 3ème, 16 septembre 2009, n° 08-16238). Elle avait aussi rappelé que la partie qui invoque par voie d'exception le caractère volontaire de l'enclave, doit en rapporter la preuve (Civ, 3ème, 7 mai 1986, n°84-16957).


Il reste que l'état d'enclave est une situation de fait, comme telle souverainement appréciée par les juges du fond (Civ, 3ème, 15 octobre 2013, n° 12-19563). Encore faut-il que ceux-ci respectent les règles de droit processuel.


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