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L’opposition du syndic au versement du prix de vente d'un lot de copropriété



L'article 2402 du code civil, dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2022, vise, parmi les créances auxquelles une hypothèque légale spéciale est attachée, « 3° Les créances de toute nature du syndicat des copropriétaires relatives à l'année courante ainsi qu'aux quatre dernières années échues sont garanties sur le lot vendu du copropriétaire débiteur ».

 

1. L’article 20 de la loi du 10 juillet 1965, fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dispose dans son I que lors de la mutation à titre onéreux d'un lot de copropriété (vente de gré à gré, vente sur licitation ou sur saisie immobilière, expropriation), et si le vendeur n’a pas présenté au notaire un certificat du syndic délivré depuis moins d'un mois (dit certificat de l'article 20), attestant qu’il est libre de toute obligation à l’égard du syndicat, le notaire doit, par LRAR et au plus tard dans les quinze jours de la mutation, donner avis de cette mutation au syndic de l'immeuble. Il s'agit, bien entendu, de protéger les intérêts des syndicats contre le risque qu'un copropriétaire endetté disparaisse avec le prix de vente de son lot, sans avoir régularisé sa situation.


Dans le délai de quinze jours à compter de la réception de cet avis, le syndic peut, par acte d'huissier contenant élection de domicile obligatoirement, former opposition au versement du prix de vente au vendeur, pour obtenir le paiement des sommes restant dues à la copropriété par ce dernier. Le syndic doit, à peine de nullité de son opposition, énoncer le montant et les causes de sa créance. Ces créances doivent être effectivement liquides et exigibles à la date de la mutation.


Les effets de l'opposition sont limités à ces sommes. Ils confèrent au syndicat le bénéfice de l'hypothèque légale spéciale prévue à l'article 2402 du code civil (dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2022). Cette hypothèque est donc dispensée d'inscription et son titulaire est réglé avant tous autres créanciers hypothécaires éventuels.

 

2. Aux termes de l'article 5-1 du décret n° 67-223 du 14 mars 1967, le syndic doit, dans son opposition, indiquer de manière précise le montant et les causes des créances exigibles (charges et travaux) en distinguant les deux années échues et les deux années antérieures à ces deux années échues.  Il doit aussi, le cas échéant, préciser les autres créances non comprises dans ces deux premières catégories.


Les sommes en cause doivent avoir fait l'objet d'appels de fonds devenus effectivement liquides et exigibles à la date de la cession du lot (Civ, 3ème, 11 octobre 2005, n° 04-17178 ; Civ, 3ème, 25 septembre 2002, n° 00-22630) et le syndic doit en justifier dans l'opposition (Civ, 3ème, 14 janvier 2016, n° 14-25614).  


Selon une jurisprudence formaliste de la Cour de cassation (mais inspirée de la lettre de la loi), le syndic, lorsqu'il formule son opposition auprès du notaire, doit distinguer précisément entre les types de créance. Il doit aussi préciser à quels lots de copropriété ces sommes sont afférentes.


A défaut de quoi, son opposition est irrégulière et ineffective. Il fait alors perdre au syndicat qu'il représente le bénéfice de l'hypothèque légale prévue à l'article 2402 du code civil (Civ, 3ème, 12 octobre 2023, n° 22-18723 ; Civ, 3ème, 22 juin 2017, n° 16-15195 Publié). Toutefois, la créance subsiste comme créance hypothécaire ou chirographaire (Civ, 3ème, 27 novembre 2013, n° 12-25824 Publié).


3. Si le vendeur donne son accord, le notaire règle le syndic et libère les fonds. A défaut d'accord du vendeur, l'expiration d'un délai de trois mois et à moins que l'opposition du syndic ne soit contestée en justice par le vendeur, le notaire verse les sommes retenues au syndicat.


Dans l'hypothèse où le not aire, soit ne procéderait pas à la notification obligatoire eu syndic, soit ne donnerait pas suite à une opposition régulièrement formulée par ce syndic, le paiement du prix de la vente et le transfert de propriété seraient inopposables au syndicat (Civ, 3ème, 8 juillet 2015, n° 14-12995 Publié). Le nouveau copropriétaire est alors débiteur à l'égard du syndicat des sommes dues par l'ancien copropriétaire (Civ, 3ème, 7 novembre 2007, n° 06-08847 Publié).

 

4. Le non respect par le syndic du délai légal ou des formes prévues par la loi pour former opposition après la notification du notaire prive son opposition de tout effet. Le paiement du prix est alors opposable au syndicat (Civ, 3ème, 18 décembre 1996, n° 94-18754 Publié ; Civ, 3ème, 26 mai 1994, n° 92-17143). Dans ces hypothèses, le syndic, qui prive ainsi le syndicat du paiement de sa créance, engage sa responsabilité.


Le paiement par le notaire des sommes visées par l'acte d'opposition du syndic ne désarme pas l'ancien copropriétaire, qui peut agir contre le syndicat en répétition de l'indu (article 1302-1 du code civil), et peut aussi engager la responsabilité du syndic qui aurait agi sans disposer d'une créance liquide et exigible.

 

5. Les dispositions du II de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1965 concernent, non plus le vendeur, mais la personne qui, déjà copropriétaire dans l'immeuble, souhaite acquérir un nouveau lot dans ce même immeuble. Introduites par la loi ALUR du 24 mars 2014, ces dispositions visent à écarter les mauvais payeurs et autres indésirables.


Avant d'établir l'acte authentique de vente, le notaire communique au syndic de la copropriété « le nom du candidat acquéreur ou le nom des mandataires sociaux et des associés de la société civile immobilière ou de la société en nom collectif se portant acquéreur, ainsi que le nom de leurs conjoints ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité ».


Le syndic doit, dans le délai d'un mois, faire connaître au notaire, lorsque l'une ou l'autre de ces personnes est bien copropriétaire dans l'immeuble, si elle a fait ou non l'objet d'une mise en demeure de payer du syndic restée infructueuse depuis plus de quarante-cinq jours.


Si tel est le cas, le notaire doit refuser de procéder à la vente.


Toutefois, lorsqu'un avant-contrat de vente a été signé, les intéressés peuvent mettre à profit un délai de trente jours pour régulariser leur situation financière vis-à-vis du syndicat.


A défaut de cette régularisation, l'avant-contrat est réputé nul et non avenu aux torts du candidat acquéreur. La responsabilité de ce dernier se trouve alors engagée à l'égard du vendeur.



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